Robert Desnos, Langage cuit, « Un jour qu’il faisait nuit », 1923
Ø Impressions premières : l’aspect énigmatique et l’incompréhension générée
Idée | Citation | Procédé |
Titre = indice, révélateur qui crée l’incompréhension et qui place le lecteur, d’emblée, dans l’interrogation quant au cadre temporel et à la nature de ce poème | Un jour qu’il faisait nuit | Jeu d’opposition immédiat > ici Antithèse (opposition entre des termes syntaxiquement éloignés : jour ≠ nuit ) |
Lecture : nécessité d’aborder le poème en deux temps (au moins !) - d’abord la surprise et l’incompréhension - ensuite l’apparition d’une certaine logique de construction reposant sur les figures d’opposition tout au long du poème | Trois exemples caractéristiques : Il s’envola au fond de la rivière. Les pierres en bois d’ébène… Tout rien. | Paradoxes (repose sur une contradiction logique qui aboutit à une absurdité : la pierre ne peut pas être en bois) Oxymore (opposition entre des termes syntaxiquement joints : tout ≠ rien) |
Effet d’inattendu : perte de logique, sentiment d’absurdité profonde. Perte d’un sens qu’on cherche à rétablir ou dont on peut se détourner. En tout cas : poème qui interpelle. | Le compas traçait des carrés et des triangles à cinq côtés. Le centre du cercle sur la circonférence | Contradiction qui s’établit aussi d’un point de vue scientifique : on dépasse la métaphore ; l’image est presque impossible à se représenter. |
Lecture = choc. Impression d’atteindre des sphères imperceptibles, que le sens nous échappe. Jour et nuit mêlés - univers onirique, merveilleux – cf. expériences de sommeil hypnotiques, jeux sur la langue chers aux surréalistes. Images nouvelles créés – impression malgré tout que ce texte raconte « quelque chose ». |
Ø Impressions secondes : l’aspect narratif et descriptif du texte
Idée | Citation | Procédé |
Des éléments du poème auxquels le lecteur se rattache : l’espoir de trouver des repères pour faire émerger la compréhension | ||
- un cadre spatio-temporel | Au fond de la rivière Sur la rive Au milieu de la Seine Au grenier Dans une allée déserte Jour… nuit Après cela Midi L’aube | Compléments du nom CC lieu Repères espace temps |
- des repères énonciatifs : narrateur, personnages | Il, l.1, 9 Je la hais, l.5 Le chasseur, l.12 Nous, l.15, 17, 18 | Variété des pronoms personnels mais qui manquent de référenciels (qui est « il » ?) (Un pronom « remplace » un nom) |
- les temps du récit, la description | Il s’envola… Je la hais d’amour… un ver de terre marque Les étoiles de midi resplendissaient | Plusieurs passés simples : actions de 1er plan, brèves 2 présents d’énonciation : effet de décrochage temporel par rapport au reste du texte De nombreux imparfaits : actions de second plan, description |
- une syntaxe claire bien qu’elle paraisse parfois peu construite | Tout rien. Les pierres les fils de fer …et la croix. Après cela … Alors nous avancions … Puis… | parfois, quelques phrases averbales mais qui ne causent pas de perte de sens. Impression de notes plutôt. Connecteurs « logiques » ! |
- un vocabulaire qui favorise la description (et par là même la figuration dans l’esprit du lecteur) | en bois d’ébène sans branches comme tout un chacun bruyant déserte | Compléments du nom Comparaison Adjectifs qualificatifs |
Des repères qui permettent au lecteur de trouver un intérêt au poème. Sensation qu’il y a une fiction à imaginer même si l’imagination reste complexe. |
Ø L’intérêt du texte pour lui-même et l’aspect poétique
Idée | Citation | Procédé |
Des éléments-repères qui permettent au lecteur la création d’images comme des apparitions, une fantasmagorie dénuée de logique pure – | Croix sans branche Il descendit au grenier Il s’envola au fond de la rivière | Métaphores ? Représentation d’une autre réalité ? Champ lexical de la mort ? Références au magique, fabuleux, merveilleux… |
Eveil des sens qui nous renvoie à l’univers de la poésie | Jour / nuit En bois, en or, la pluie nous sécha La mort respirait de grandes bouffées de vide En silence, un bruyant discours | Vue Toucher Odorat et goût +/- Ouïe |
Référence éminemment poétique : expression du moi et des sentiments | Je la hais d’amour | Réappropriation du lyrisme |
Travail du point de vue des constructions rythmiques et sonores : musicalité de la langue employée par le poète | Les pierres… ≠ Tout rien l.2-4 Ex parmi d’autres : Le compas traçait des carrés et des trianges à cinq côtés. | Rupture, choc Allitérations en [k], [s], [t], assonances en [a], [é] |
Tableaux dans lesquels on contemple le triomphe de la liberté, la perte « du contrôle de la raison pure » chère aux surréalistes. Le rêve apparaît ici comme un absolu poétique. |
Un bel exemple de poème surréaliste cf définitions de Breton, Manifeste[s] du surréalisme – LIBERTÉ, POÉSIE, CONTRAINTE FORMELLE ET ASPECT LUDIQUE, UNIVERS ONIRIQUE
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