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30/05/2011

Levons le mystère sur le paratexte des Liaisons dangereuses

La notion de “paratexte” (formé à partir du grec para signifiant à côté de) renvoie aux différentes informations données dans un ouvrage pour faciliter la compréhension du texte :
- nom et présentation de l’auteur
- titre
- date de publication
- présentation de l’oeuvre en quatrième de couverture
- contexte historique
- notes de bas de page
- préface ou postface, etc.
Le plus souvent, ces indications sont rédigées par un commentateur spécialiste de l’oeuvre proposée. Toutefois, l’auteur lui-même peut présenter son ouvrage en s’adressant directement à ses lecteurs dans une préface, un préambule ou un avertissement comme c’est le cas pour Les Liaisons dangereuses -on parle alors de paratexte auctorial.



Traditionnellement, le roman épistolaire du XVIIIe siècle cherchait à donner l’illusion de l’authenticité en se faisant passer pour une correspondance réelle, trouvée dans un tiroir ou recueillie par un tiers qui en aurait ensuite assuré la publication. Pour accréditer ce jeu qui ne trompait cependant guère de lecteurs, la plupart des romans épistolaires étaient accompagnés d’une préface où l’auteur prétendait n’être que l’éditeur ou le dépositaire du recueil de lettres. L’auteur des Liaisons dangeureuses ne déroge pas à cette tradition mais en exhibe ironiquement la facticité dans ces deux textes liminaires qui se contredisent mutuellement.



Citations à retenir :
- Le titre :
Les Liaisons dangereuses ou Lettres recueillies dans une société et publiées pour l’instruction de quelques autres”
Une épigraphe de Rousseau : “J’ai vu les moeurs de mon temps et j’ai publié ces lettres”, préface de La Nouvelle Héloïse



- Dans l’Avertissement de l’Editeur :
“(...) nous ne garantissons pas l’authenticité de ce Recueil et nous avons même de fortes raisons de penser que ce n’est qu’un Roman.”
“plusieurs des personnages qu’il (l’Auteur) met en scène ont de si mauvaises moeurs qu’il est impossible de supposer qu’ils aient vécu dans notre siècle, dans ce siècle où (...) les lumières (...) ont rendu, comme chacun sait, tous les hommes si honnêtes et toutes les femmes si modestes et si réservées.”



- Dans la Préface du Rédacteur :
“Cet ouvrage, ou plutôt ce Recueil (...) ne contient que le plus petit nombre des Lettres qui composaient la totalité de la correspondance dont il est extrait.”
“Chargé de la mettre en ordre par les personnes à qui elle était parvenue (...) j’ai presque toujours suivi [l’ordre] des dates”
“Je dois prévenir aussi que j’ai supprimé ou changé tous les noms des personnes dont il est question dans ces Lettres (...)”
“Le mérite d’un Ouvrage se compose de son utilité ou de son agrément, et même de tous deux (...)” (INSTRUIRE et PLAIRE !)
“Un qualité (...) : c’est la variété des styles ; mérite qu’un Auteur atteint difficilement (...)”
“Il me semble que c’est rendre un service aux moeurs, que de dévoiler les moyens qu’emploient ceux qui en ont de mauvaises moeurs pour corrompre ceux qui en ont de bonnes (...)”




Pour info, extrait de la Préface de la Nouvelle Héloïse, le plus grand roman épistolaire de l’époque :
Il faut des spectacles dans les grandes villes, et des Romans aux peuples corrompus. J’ai vu les moeurs de mon temps, et j’ai publié ces lettres. Que n’ai-je vécu dans un siècle où je dusse les jeter au feu !
Quoique je ne porte ici que le titre d’Editeur, j’ai travaillé moi-même à ce livre, et je ne m’en cache pas. Ai-je fait le tout, et la correspondance entière est-elle une fiction ? Gens du monde, que vous importe ? C’est sûrement une fiction pour vous.

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